Le GroupeExercice 2021-2022
2021-2022 : un exercice charnière !
Regards croisés avec Jérôme Calleau, président et Jacques Bourgeais, directeur général
1er juillet 2021… 30 juin 2022, nous sommes passés dans un autre monde…
Jérôme Calleau – Après deux années ponctuées par la crise sanitaire Covid et son cortège de restrictions, la période a été marquée par un rebond économique assez inédit qui a généré dès 2021 une inflation des prix des matières premières. Mais indéniablement c’est l’invasion de l’Ukraine par la Russie fin février 2022 qui constitue l’évènement géopolitique majeur de cette période avec son cortège de conséquences; humanitaires avant toute chose mais économiques également ; avec pour le monde agricole, une explosion du prix des énergies et par voie de conséquences des engrais azotés et tout autant des céréales et oléagineux. De quoi chambouler de très nombreux équilibres.
Alors que retenir d’essentiel de l’exercice 2021-2022 en matière agricole ?
JC – Après une récolte 2020 très mauvaise, les récoltes 2021 ont été globalement bonnes, voire même très bonnes. De quoi donner du baume au cœur aux agriculteurs jusqu’à la fin de l’année 2021. D’autant que les cours à la fois des céréales et des produits animaux s’étaient raffermis dans des proportions plutôt raisonnables. Donc globalement une bonne année agricole 2021. Mais c’était là sans compter sur un premier semestre 2022 beaucoup plus anxiogène !
La guerre en Ukraine, l’inflation insensée du prix du gaz, des engrais, des matières premières agricoles et par voie de conséquence du prix des aliments du bétail… Et puis concomitamment à l’invasion russe en Ukraine, les Pays-de-la-Loire ont connu fin février / début mars 2022, les affres de la grippe aviaire qui a décimé les élevages de volailles. Enfin un déficit hydrique important est apparu sur ce premier semestre de 2022 dont les conséquences sur l’exercice suivant 2022-2023 seront particulièrement sévères.
Que dire des résultats du groupe sur cette période ?
Jacques Bourgeais – Les résultats du groupe ont bénéficié d’un contexte agricole 2021 porteur et des bonnes récoltes. Les résultats économiques au 30 juin 2022 se situent dans la continuité des bons résultats de 2020-2021. D’autant que certaines filiales se sont particulièrement bien comportées :
- Les métiers de la jardinerie et du paysage ont poursuivi leur belle dynamique. Cavac Distribution et Vertys ont sur-performé.
- Le métier de l’isolation des bâtiments que porte Cavac Biomatériaux (marque Biofib’) a lui aussi été porté par une dynamique favorable ; à un point tel que les installations industrielles existantes sont aujourd’hui saturées.
- Le pôle négoce agricole VSN a lui aussi enregistré un très bon résultat.
S’agissant du pôle agroalimentaire, les évolutions ont été plus contrastées car l’inflation brutale des charges (prix des matières premières et charges d’exploitation) a été souvent compliquée à répercuter aux clients. Dans la perspective d’un exercice 2022-2023 rendu plus compliqué au regard de la sécheresse historique de l’été 2022, les comptes au 30 juin ont été arrêtés de façon délibérément très prudente et anticipent quelque peu certaines déconvenues à venir. Le résultat net consolidé au 30 juin 2022 a été ainsi arrêté à 7,6 millions d’euros pour une capacité d’autofinancement de 30,2 millions d’euros.
Quelles auront été les principales initiatives du groupe en matière d’investissements et d’activités nouvelles ?
JB. L’enveloppe d’investissements du groupe sur l’exercice 2021-2022 est du même ordre que celle de l’exercice précédent et elle atteint 21 millions d’euros. Très en-deçà de la capacité d’autofinancement.
Les investissements récurrents (véhicules, informatique, gros entretien des usines – silos – unités industrielles) participent quasiment pour moitié à cette enveloppe. Au-delà, il a été acquis sur le secteur Marais, une capacité de stockage de céréales de 10 000 tonnes ; il a été démarré la construction du nouveau site de conditionnement de légumes secs et des bureaux à Mouilleron-le- Captif ; il a été acquis sur ce même site, des chambres froides permettant une meilleure conservation des familles semences et légumes secs ; il a été réalisé une rénovation des installations « froid» sur la station pommes de terre des Epesses. Il a été réimplanté les bureaux de l’activité petits ruminants Ovicap (ovins viande, ovins lait et caprins) à proximité du pôle bovins Bovineo.
Sur l’usine de fabrication d’aliments de Fougeré, le chantier de construction de capacités additionnelles de stockage en produits finis extrudés a démarré ; des bâtiments de stockage fertilisants ont été édifiés à proximité de la plateforme logistique. De même que la rénovation du centre de traitement des déchets (plastiques & cartons). Chez Atlantique Alimentaire, la chaine de préparation / conditionnement des légumes secs précuits a été implantée. À noter enfin l’installation d’un premier corner (présentoir) de produits alimentaires locaux (frais et secs) sous l’enseigne Cagettes & mogettes au sein du Gamm Vert de Saint-Gilles-Croix-de-Vie.
Quels sont les gros enjeux des mois et des années à venir ?
JC : Le groupe Cavac a su consolider au fur et à mesure des années, une stratégie forte de productions en filières différenciatrices et sous cahiers des charges qualité. En Bio comme en non- Bio. Elle en a fait son ADN.
Cette stratégie s’est voulue gagnante et au service des sociétaires qui ont pu en s’éloignant des productions banalisées, capter de réelles valeurs ajoutées. L’année 2022 marque un virage car l’inflation assez incroyable des prix des céréales et divers oléo-protéagineux bouscule de très nombreux équilibres. Les productions plus spécialisées ou répondant à des cahiers des charges plus exigeants, pourraient bien être boudées par les agriculteurs, face à des marchés de masse rémunérateurs.
L’un des enjeux des mois à venir est de convaincre les sociétaires de la nécessité de ne pas remettre en cause ce qu’il a fallu des années à construire. Les consommateurs également séduits ces dernières années par le Bio et les produits sous signe de qualité, modifient leur comportement sur fond de contraction de leur pouvoir d’achat et ont tendance à revenir au réflexe des achats à prix bas, de produits plus basiques. Gageons que nos produits prémium pourront vite retrouver une bonne dynamique dans les rayons. L’année 2022 a pour effet de réduire la visibilité en matière économique. Rarement le monde aura été aussi incertain. Et les soubresauts des marchés l’illustrent, oh combien.
Nous négocions également un virage dangereux en matière énergétique et le réchauffement climatique s’installe de façon durable. Autant d’éléments qui ne sont pas spécialement rassurants et qui imposent en tout cas, d’ajuster certaines façons de produire (sobriété énergétique, optimisation des intrants, pilotage des assolements, stockage de l’eau…).
Mais cette année 2022 met également en exergue les exigences accrues en matière d’autonomie alimentaire du pays ; et au-delà, en matière de production alimentaire destinée à une population mondiale qui ne fait que croitre et face à quoi certains pays se trouvent démunis. C’est là une bonne nouvelle pour un pays comme la France ; plus que jamais, nous revendiquons une agriculture de production. N’en déplaise aux nombreux détracteurs partisans d’un repli sur soi et d’une agriculture rétrograde. Si nous traversons indéniablement une zone de turbulences avec beaucoup d’incertitudes, il n’empêche que notre agriculture a de belles perspectives devant elle.
Il faut savoir le crier fort et tenir des propos encourageants aux jeunes qui souhaitent s’installer, car le renouvellement des générations constitue un enjeu de taille. Notre coopérative qui évolue sur un territoire aux très nombreux atouts (conditions pédoclimatiques, diversité des productions, proximité des outils agroalimentaires…) est fortement mobilisée pour relever ces défis. Elle y mobilise des compétences et des capitaux importants pour un futur qui sera certainement différent mais qui reste porteur de tous les espoirs.